Dans une note publiée le 29 septembre 2021 par l’Institut Montaigne, la Directrice du programme santé Angèle Malâtre-Lansac fait un état des lieux détaillé des dysfonctionnements dans l’organisation du parcours de soins du patient. Elle y formule 5 propositions concrètes pour rendre le parcours patient plus fluide, efficient et personnalisé. Un soutien particulier est apporté à la e-santé, véritable levier de transformation au service des patients comme des professionnels de santé.
SOMMAIRE
- Un patient acteur de sa santé
- Un manque de lisibilité dans le parcours de soins…
- …qui pèse sur la qualité des soins et leurs coûts
- Des outils numériques indispensables pour inventer les parcours de soins de demain
- Mieux prendre en compte l’expérience du patient
- Les recommandations de l’Institut Montaigne
Un patient acteur de sa santé
Les transformations récentes de notre système de santé et de notre société ont modifié le rôle du patient dans son parcours de soins. Les patients demandent à être plus informés et impliqués dans leurs parcours de soins. Pourtant, si l’étude portée par l’Institut Montaigne souligne que 90% des patients jugent que la publication d’indicateurs sur la qualité des soins vécus par le patient est une bonne chose, nous sommes encore loin d’impliquer suffisamment les patients dans leurs parcours de soins. Il est encore trop en décalage avec les réelles attentes et besoins des Français. Leur sentiment très dégradé envers l’accès aux soins en témoigne. 37% d’entre eux déclarent avoir l’impression de vivre dans un désert médical.
Un manque de lisibilité dans le parcours de soins…
La complexification du parcours de soins est aujourd’hui largement corrélée au vieillissement de la population et à la multiplication des maladies chroniques. Celles-ci nécessitent une prise en charge de longue durée ainsi que l’intervention de différents professionnels de santé. Comme le souligne l’institut Montaigne, les patients peuvent se retrouver démunis face à la multitude de praticiens et d’interlocuteurs sollicités au cours de leur prise en charge. Ils déplorent un manque de coordination et de transmission de l’information entre les professionnels de santé.
On constate par ailleurs qu’elle repose encore beaucoup trop sur les patients et leurs aidants. Pour le patient, cela rajoute un poids supplémentaire à la maladie. Il y a pourtant de fortes attentes du côté des patients et des professionnels de santé. D’après une étude de l’Institut Français de l’expérience patient (IFEP), 88% des patients interrogées estiment que le partage d’expérience est utile à toutes les parties prenantes. Aux patients, aux professionnels de santé, ainsi que pour les autorités de santé. L’étude indique que 96% des professionnels interrogés sont prêts à s’investir pour l’amélioration de l’expérience patient.
…Qui pèse sur la qualité des soins et leurs coûts
Le manque de coordination entre professionnels de santé a des conséquences désastreuses sur la qualité des soins prodigués aux patients. Une information mal transmise peut entraîner une multitude d’événements indésirables. Comme par exemple une erreur médicamenteuse, une intervention retardée ou une errance face au diagnostic. En plus des conséquences néfastes sur la qualité des soins, l’Institut Montaigne nous rappelle que l’organisation chaotique de l’offre de soins a de fortes conséquences sur les coûts et les dépenses de santé.
En effet, le manque de coordination et de communication entre soignants et personnels de santé entraîne souvent une redondance des actes, une surprescription de médicament ou encore un mille-feuille administratif. Ces inefficiences ont un coût qui pourrait être réduit. En effet, on sait que la France consacre 11,3 % de son PIB à la santé. Ces « gaspillages » représententeraient près de 20 % de nos dépenses de santé selon l’OCDE.
Des outils numériques indispensables pour inventer les parcours de soins de demain
De plus en plus d’outils numériques sont mis au service des soignants et des usagers. Développés pendant la pandémie, CovidTracker et TousAnticovid en sont des exemples. Ils témoignent de l’ouverture de notre système de santé à des acteurs nouveaux. Plateformes de téléconsultation, prise de rendez-vous en ligne, objets connectés… Les acteurs privés et de la société civile ont aujourd’hui leur place dans l’univers très institutionnel de la santé.
On estime qu’il existe plus de 350 000 applications numériques dédiées à la santé dans le monde! Dans ce contexte, le numérique peut agir à plusieurs niveaux pour améliorer le parcours de soins. Il peut aider à faire de la prévention en santé en diffusant l’information auprès de la population. Par exemple dès l’école primaire, grâce à des jeux interactifs. Ou au quotidien au travers de campagnes d’informations. Par ailleurs, certains objets connectés peuvent permettre aux patients atteints de maladies chroniques de suivre l’évolution de leur maladies et d’interagir à distance avec leurs soignants.
Mieux prendre en compte l’expérience du patient
On sait d’ailleurs qu’il existe des applications permettant au malade de tenir un “journal”. Il peut y écrire son ressenti, ses réactions au traitement, ses appréhensions et la manière dont il vit la maladie. Les réponses transmises au soignant via l’application sont précieuses car elles représentent une véritable aide à la décision thérapeutique pour le professionnel de santé. Le numérique peut donc permettre une meilleure prise en compte de l’expérience du patient à différents moments du parcours de soins. Avant l’hospitalisation, pendant le traitement et après les soins qui lui ont été prodigués.
Numériser certains documents comme le recueil du consentement du patient (voir notre article à ce sujet) ou tout autre document nécessaire à la prise en charge du patient peut faire gagner du temps au praticien. Cela facilite la communication entre les soignants et assure une prise en charge fluide et adaptée du patient. En plus, cette démarche contribue à éliminer progressivement le papier. En France, il existe déjà des outils au service des parcours de soins, à l’instar du Dossier Médical Partagé (DMP). Créée pour faciliter le partage d’informations et la coordination, il doit éviter au patient de redonner son historique médical à chaque fois qu’il consulte un nouveau praticien. Il doit être déployé au sein de Mon Espace de Santé en 2022.
Les recommandations de l’Institut Montaigne
Ces propositions visent à repenser le parcours de soins dans une logique d’autonomisation du patient et de suivi global de sa prise en charge. L’objectif est d’inclure davantage de prévention et d’améliorer l’accompagnement avant et après la prise en charge du patient.
Mettre les ressources humaines au cœur de la transformation des parcours de soins
Si les outils numériques peuvent améliorer la qualité des soins, ils ne pourront être efficaces sans une meilleure formation des professionnels de santé et des patients à la e-santé ou encore aux data.
Faire de la qualité des soins une priorité
L’Institut Montaigne recommande de développer et de systématiser les indicateurs relatifs à la qualité des soins. A ce sujet, les des PREMS et des PROMS représentent une réelle opportunité (Voir notre article à ce sujet).
Garantir la sécurité, l’accès et la portabilité des données de santé
Cette étape est nécessaire pour faciliter l’échange d’informations entre professionnels de santé et permettre aux patients de changer de professionnel ou d’établissement sans perte d’information. L’interroperabilité des données de santé est un sujet d’autant plus important qu’il permet de faciliter la recherche ainsi que le déploiement de dispositifs de santé numérique à grande échelle.
Faciliter l’accès à des solutions numériques adaptées aux besoins des patients
L’Institut montaigne recommande la consolidation de la filière e-santé, afin “d’éviter l’éparpillement de solutions digitales, de même que leur évaluation et leur service rendu”. En effet, de plus en plus de start-up de la e-santé se développent en France pour proposer des solutions innovantes au services des administrations, des usagers et des professionnels de santé. Certains secteurs de l’innovation en santé comme la réputation en ligne des médecins ou bien celui de l’expérience patient sont encore trop peu considérés.
Rendre plus fluides les passages entre ville, domicile, hôpital et médico-social
Un des chantiers de la transformation de notre système de santé est de repenser les modalités de financement. Pour améliorer la qualité des soins et l’efficience de notre système de santé, il faudrait renforcer la rémunération à la performance et à la qualité, et s’éloigner davantage de la rémunération à l’acte. Comme le souligne l’Institut Montaigne, les modalités tarifaires actuelles participent encore trop à la fragmentation entre médecine, ville, hôpital et médico-social.
C’est pourquoi des modalités de paiement alternatifs doivent être développées afin de garantir coordination, qualité et efficience. Enfin, l’Institut Montaigne reconnaît la nécessité de revoir les incitations financières des professionnels de santé pour les encourager à la remontée de données et aux usages en e-santé. Parmi elles, on peut citer L’incitation financière pour l’amélioration de la qualité (IFAQ). Les établissements participant aux démarches IFAQ sont soumis à l’évaluation de leurs démarches qualité et peuvent prétendre à une rémunération en fonction des résultats atteints (Voir notre article à ce sujet).[fancy-ul icon_type= »standard_dash » color= »Accent-Color » alignment= »left » spacing= »default »]D’autres articles sur des thématiques connexes:
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